Je m'installais sur une chaise, en face d'une femme d'environ quarante ans, portant des lunettes et ayant redressé ses cheveux roux en un chignon. Elle s'assit à son bureau en face de moi. Stressée, je bougeais mes doigts dans un rythme régulier, et je scrutais la pièce pour éviter son regard. La pièce était chaleureuse et très illuminée, il y avait un petit canapé, une table basse et un fauteuil d'un côté, de l'autre se trouvait une étagère remplie de livre et accroché aux murs, des diplômes divers. J'étais chez la meilleure psychologue de la ville. Elle se racla la gorge, je me décidais alors à la regarder. Elle avait des yeux bruns noisettes et un air doux. J'étais immédiatement en confiance. "Très bien Jenna. Nous allons continuer la séance de la dernière fois. Prête ?" J'acquiesçais alors, me levant et me dirigeant vers le sofa que j'avais remarqué avant. J'assis une nouvelle fois. Je sentais qu'aujourd'hui, c'était le jour où j'allais enfin me dévoiler. "Alors Jenna. Parle moi de ce qui te tracasse, de ton enfance." Me demanda t-elle en prenant place sur un fauteuil en cuir noir. Elle me sourit tendrement. Je passais ma main dans mes cheveux blonds avant de lui répondre. "Je ne sais pas, comment, dire ça ..." Avouais-je en baissant les yeux. Je n'aimais pas parler de mon passé, encore moins de cet épisode de ma vie, mais je le devais bien. "Et bien, commence par me dire ce que tu ressentais." Déclara t-elle, un nouveau sourire accroché à ses lèvres. Je respirais doucement, cherchant mes mots. Elle resta patiente, j'aimais ça. "Je ne sais pas vraiment ce que je ressentais. C'est comme si j'avais été une simple spectatrice. J'entends par là que je n'avais aucun pouvoir, aucune force face à lui. J'étais hors de mon corps, j'étais pétrifiée, mes membres étaient complètement bloqués. Bien sur, il y a ce sentiment de saleté qu'on ressent juste après. On a qu'une envie se laver à en faire saigner notre chair. Et le sentiment de honte. On a peur de tout les hommes qu'on croise, on ne supporte d'être touché, frôlé." Je me stoppais, reprenant mon souffle alors que les larmes me montaient. "En fait, j'ai peur sans arrêt. Il n'y a pas une minute sans que je pense à lui, à ce qu'il m'a fait. J'ai constamment peur, et c'est invivable." J'éclatai alors en sanglot, alors que la rousse me tendait une boîte de mouchoirs. Je venais de décrire ce que je ressentais, lorsque enfant, mon père venait le soir, dans mon lit, me violer. Ma mère était morte en me mettant au monde, et j'avais plus que ce monstre pour être élevé. Ce monstre qui a abusé de moi, qui a volé mes joies d'enfants. "Vous vous rendez compte que j'ai peur qu'un homme me regarde, me sourit, me touche. Alors que c'est tout ce que je voudrais. Un homme qui m'aime et qui me rende heureuse. Mais je suis tellement paralysée par mes vieux démons, qu'y songer et impossible." J'étais à ce moment, totalement vulnérable. Moi, Jenna Spencer Coolbsy, je faisais face à mon passé, j'exprimais mes sentiments, j'essayais d'avancer. "Il y a cet homme, au travail. C'est mon résident. C'est interdit, mais je ne peux m'empêcher de ressentir des frissons dans tout le corps à chaque fois qu'il me sourit. Il m'attire, mais je bloque totalement. Je perds mes moyens, et ce n'est pas seulement à cause de lui ..." Je parlais de Dylan. J'étais interne en chirurgie depuis peu de temps, et j'avais totalement craqué sur mon titulaire. Une homme non seulement beau, mais aussi charmant, intelligent et qui me faisait rire. Le genre d'homme que je rêverais d'avoir en petit ami. Mais c'était impossible.