“ Mignonne, allons voir si la rose ... ”

Le ciel étoilé. Cela faisait longtemps que je n'y avais pas porté attention. Mes prunelles étaient écarquillées alors que j'observais avec douceur mais, aussi avec une certaine mélancolie, l'immensité qui s'offrait devant moi. Y avait-il quelque chose de plus beau, le soir, après avoir passé une journée difficile ? Je ne pensais pas. C'était si reposant de pouvoir s'évader ne serait-ce que l'espace d'un instant. Il faisait sombre, le froid mordait mon visage mais, aussi mes bras et mes mains et pourtant je ne m'étais pas senti aussi bien depuis longtemps. La nuit était fraiche et s'était sans doute mon moment préféré de la journée. Il faisait toujours chaud à Miami et un peu de fraicheur faisait du bien à mon goût. En cet instant, je n'avais qu'une envie, m'évader, partir en courant de cet endroit ou tant de personnes perdaient la vie, ou tant de personnes souffraient à cause de la perte d'un être cher. Généralement, je ne ressentais rien. J'étais comme anesthésié de toute cette souffrance qui m'entourait mais, depuis que j'avais retrouvé Junie, quasiment agonisante sur le sol gelé d'une des chambres de l'hôpital, je voyais toute cette souffrance différemment. Chaque décès de patients que je côtoyais me touchais. Chaque larme de familles des victimes, atteignait mon cœur même si je n'avais aucune idée de la raison de leurs pleures. Junie avait changé quelque chose en moi, ou plutôt, elle avait éveillé quelque chose qui s'était endormi profondément à l'intérieur de moi-même. À présent, j'avais l'impression de n'être qu'un oisillon devant faire attention à tout pour ne pas être blessé et cela me désarçonnait je devais bien l'admettre.

Un frisson avait alors parcouru mon corps. Je fermais les yeux et respirais. J'avais l'impression que ma gorge brûlait et que cet exercice était devenu compliqué. Ce n'était pourtant pas dur de respirer, nous le faisions tous inconsciemment. Pourtant, j'avais quelques difficultés alors que des larmes commençaient à perler à l'intérieur de mes prunelles, devenues légèrement grisées à cause de l'heure tardive mais, aussi de la lueur de la lune. Regardant autour de moi, je remarquais soudainement que j'étais seul, pourtant j'avais cette impression qu'il y avait quelqu'un non loin de moi. « Il y a quelqu'un ? » Avais-je alors entonné. Aucune réponse. Je n'avais que le silence comme ami à cet instant. Soupirant et jetant un œil à ma montre je remarquais que j'étais particulièrement en retard. Séchant les larmes qui commençaient à couler sur mes joues, je me relevais pour pouvoir rentrer à l'intérieur de l'hôpital. Je devais rendre une dernière visite à ma chieuse préférée qui, je l'espérais était dans son lit à cette heure mais, avec Junie, cela était moins sûr. Faisant un léger signe de la tête à la réceptionniste je m'aventurais dans le couloir lorsqu'un infirmier arriva à ma hauteur. « Hum ... Désolé de te dire cela Z mais, elle n'est bien entendue pas dans son lit. » Passant une légère main dans ma chevelure je m'en allais dans mon vestiaire pour prendre mon manteau. Bien évidemment à cette heure avancée elle ne pouvait être que dehors. Je commençais à bien connaître ma petite Junie. « Heu, pas de cris, pas de coup de poings ? Tu mûris Z, où tu me caches quelque chose. Z ? » J'étais déjà partie alors qu'il continuait de parler. J'avais des amis ou plutôt devrais-je dire connaissance à l'hôpital et il était vrai que j'étais plutôt calme alors que de coutume j'étais une personne sanguine. Mais, je commençais à m'habituer à ce que me faisait Junie et puis, je n'arrivais plus à lui en vouloir ou encore à être en colère après elle depuis cet incident qui s'était produit la dernière fois. Je me souvenais encore de son teint livide et de sa peau gelé. J'avais cru avoir un cadavre devant moi ... Soupirant, je me hâtais d'aller dehors, ajustant mon manteau pour que lorsque j'allais lui mettre sur les épaules, il soit un tant soit peu chaud. « Junie ? » Commençais-je à héler alors que je me retrouvais sur le parking de l'hôpital. « Junie, je sais que tu es là, dépêche-toi de venir me rejoindre, tu vas attraper la mort en restant ainsi dehors ! » Et ce n'était pas peu dire ! « JUNIE ! » Je commençais réellement à perdre patience lorsqu'une silhouette se dessina non loin de moi. C'était Junie qui m'avait apparemment entendu et qui venait à ma rencontre. Elle avait un appareil photo à la main, celui qu'elle gardait toujours précieusement près d'elle. Esquissant un sourire j'ôtais mon manteau, sans écouter ses sarcasmes et je le déposais sur ses épaules. « Et si nous continuions cette conversation dans ta chambre Junie ? Je te promets de laisser ta fenêtre ouverte pour te laisser voir la lune mais, tu auras un supplément de couvertures. Aller rentrons. » D'un geste instinctif je lui avais pris la main et m'en étant rapidement aperçu, je m'étais mis alors à rougir légèrement. Pinçant mes lèvres, j'ôtais ma main pour la passer dans ma chevelure au reflet roux avec la lueur de la lune. « Aller Junie, dépêche-toi je te prie. » J'emboîtais le pas, gardant un œil sur elle pour être certain qu'elle me suive.